

Voici le seul bâtiment qui ne fut pas construit à l’origine pour devenir un hôtel de luxe. Cependant, lorsque l’on découvre son incroyable histoire, le regard qu’on lui porte n’est plus jamais le même.
En 1882, sur les falaises de la Côte des Basques, Arturo Heeren, un riche rentier prussien, achète et démolit trois vieilles maisons pour transformer le quartier de Biarritz. Marié à la sœur du futur président péruvien, Heeren, naturalisé espagnol, s'intègre rapidement à la société locale. Avec l'aide de l'architecte allemand Auguste Beck, il construit une somptueuse demeure de style britannique, rappelant un manoir du Kent.
Les Biarrots sont éblouis par ce bâtiment à trois étages avec cour d'honneur et parc. Sa façade s'étend en vastes terrasses, dévoilant un panorama spectaculaire jusqu'en Espagne.
La famille Heeren s’installe et organise des réceptions somptueuses, largement relayées par la presse. En 1914, la guerre met fin aux divertissements. Le comte de Heeren offre sa propriété pour accueillir les blessés, mais des rumeurs malveillantes surgissent en raison de ses origines allemandes, au point que la famille est contrainte de fuir à Saint-Sébastien. En 1919, le comte vend tout ce qu'il possède à Biarritz. La villa est récupérée par un Béarnais, Georges Philippe, puis par son beau-fils, le Dr Albert Plantier. Ce dernier la baptise « Hélianthe » et fonde l’« Institut d’agents physiques et palais de régime », plaçant Biarritz à la pointe de la thalassothérapie en France.
Transformé en hôtel de repos dans un cadre verdoyant, Hélianthe propose des régimes préparés et dispose d'un hall somptueux, de salons, d'une salle à manger spacieuse, de salles de billard et de chambres cossues. Une aile est ajoutée, avec des salons de lecture, des salles de réception et même un atelier de peinture. L’hôtel propose 80 chambres, des suites confortables et un solarium donnant sur le golfe de Gascogne et les Pyrénées.
L'été 1925 marque une période bénie pour Hélianthe. Des célébrités, en particulier le prince de Galles, contribuent à transformer l'image de la station. En 1926, la construction de l'institut de physiothérapie Rosalia, annexé à l'hôtel, attire une clientèle internationale, et fournit des services ultra-modernes dans diverses thérapies.
Mais la crise de 1929, suivie de la guerre d’Espagne, provoque l'effondrement du Biarritz mondain. Malgré le retour de personnalités telles que le prince de Galles, Léon Blum et Chanel, l'hôtel périclite. Il est vendu peu après aux enchères publiques et passe entre différentes mains.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il est occupé par les Allemands. De 1945 à 1946, l’Université américaine s’y installe. Puis le domaine est laissé à l'abandon jusqu'à sa vente en appartements en 1957. Vers 1960, la falaise privative est cédée à un promoteur qui construit « Le Sunset », un immeuble en béton au pied d’Hélianthe.
Aujourd’hui, les élégants portails ouvrant sur l’esplanade de la propriété sont les grilles ouvragées de l’ascenseur. On peut y discerner les initiales de ce qui fut et restera à jamais le flamboyant Hélianthe des Années folles.